Socialistes au service du syndicalisme

Tribune de Jean-Claude Rennwald, politologue, militant socialiste et syndical

Durant les quatre dernières années (2011-2015) d’activité parlementaire fédérale, le Parti socialiste (PS) et subsidiairement les Verts ont été les deux formations politiques les plus proches des travailleuses et des travailleurs ainsi que de leurs organisations syndicales. A l’inverse, l’Union démocratique du centre (UDC) est le parti qui s’est le plus opposé aux revendications du monde du travail. C’est ce qui ressort d’une analyse de l’agence de communication Bording Crossing AG, pour le compte de Syndicom et du SEV (Syndicat du personnel des transports), deux des plus importantes fédérations de l’Union syndicale suisse (USS), après Unia.

PLR à la traîne aussi

Sur 5’000 votes ayant eu lieu au Conseil national entre la session d’hiver 2011 et la session d’été 2015, Border Crossing AG a choisi, au cours de plusieurs étapes, 24 votes déterminants sur des questions de politique sociale, de transports, d’énergie, de service public et de revendications syndicales. A chaque fois, le vote des parlementaires a été comparé avec la position du SEV et de Syndicom.

Dans le classement établi sur cette base, le Parti libéral-radical (PLR) est, après l’UDC, le parti le moins proche des travailleurs et des syndicats, alors que le Parti évangélique, les Verts libéraux, le Parti bourgeois démocratique (PBD) et le PDC occupent une position intermédiaire.

Le PS en pointe …

Parmi les 50 conseillers nationaux qui ont voté le plus souvent de manière conforme aux préoccupations syndicales, on trouve 42 socialistes, 7 Verts et une élue du Parti évangélique. A l’autre bout de l’échelle, sur les 50 conseillers nationaux qui s’opposent le plus fréquemment aux propositions des syndicats, il y a 49 députés UDC et l’unique représentant du Mouvement des citoyens genevois (MCG). Ce positionnement de l’UDC tord clairement le cou à l’idée que ce parti défend les intérêts des salariés à revenu modeste, des retraités, bref, des « petites gens ». Ce qu’on savait d’ailleurs depuis longtemps, puisque son idéologue en chef Christoph Blocher est deux fois milliardaire….

… les Romands aussi

Dans ce classement, les socialistes romands tirent particulièrement bien leur épingle du jeu. Au premier rang, on trouve en effet le Jurassien Pierre-Alain Fridez, à égalité avec la Vaudoise Rebecca Ana Ruiz et le Zurichois Thomas Hardegger. Parmi les vingt premiers du classement, il y a encore sept socialistes romands, soit les Vaudois Roger Nordmann, Cesla Amarelle Ada Mara et Jean-Christophe Schwaab, la Fribourgeoise Valérie Piller-Carrard, le Neuchâtelois Jacques-André Maire et le Genevois Manuel Tornare. Au total, les socialistes romands occupent ainsi près de la moitié (9 sur 20) des vingt premiers rangs. Ce qui montre qu’en Suisse romande, les liens entre socialistes et syndicalistes sont plus étroits que de l’autre côté de la Sarine.

Syndicalisme et politique se complètent

Certes, en Suisse comme dans beaucoup d’autres pays, les conventions collectives de travail (CCT) constituent l’instrument essentiel des syndicats en vue de défendre les salariés et d’améliorer leurs droits. Toutefois, le travail conventionnel ne permet pas de résoudre tous les problèmes que rencontrent les travailleurs, car certains d’entre eux relèvent de décisions législatives et politiques, comme ceux qui ont trait à l’AVS, au 2e pilier, à l’assurance-maladie, aux services publics ou à la libre circulation des personnes et à la lutte contre le dumping social et salarial. Et ces quatre prochaines années, les défis ne manqueront pas : prévoyance professionnelle (retraites), réforme III de l’imposition des entreprises, alternative à l’initiative de l’UDC « contre l’immigration de masse », pour ne citer que quelques exemples.

Un frein au social-libéralisme ?

Dans ces domaines, il importe donc que les syndicats soient présents à toutes les étapes du processus de décision, raison pour laquelle il n’est pas sans intérêt de savoir quels sont les partis politiques et les élus qui sont les plus proches d’eux, même si les uns et les autres doivent garder leur indépendance et leur spécificité. A l’inverse, le PS et les autres partis de gauche ne devraient pas oublier que plus un groupe de population est syndiqué, plus il vote en leur faveur. Un constat, espérons-le, qui devrait mettre définitivement un frein aux dérives sociales-libérales, en Suisse comme à l’étranger. Dans cette perspective, la récente élection du député Jeremy Corbin – très lié au mouvement syndical – à la tête du Parti travailliste anglais est un très fort signal d’espoir.

 

 

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